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A moy que chault!

Les enfants pauvres

29 Avril 2018, 12:55pm

Publié par amoyquechault.over-blog.com

On les croise, souvent dans le métro ou le bus, derniers lieux où se mêlent encore un peu les différentes classes sociales. On les reconnaît au premier coup d'oeil à leurs baskets blanches à scratch sans logo et leurs tignasses mal coupées à la maison...

Ils ont parfois le regard triste mais jamais cette moue boudeuse, renfrognée, déjà blasée quand elle n'est pas arrogante et agressive, des gamins trop gâtés, pourris dès le berceau sous l'accumulation des peluches, des hochets et des jouets divers dont on regrette parfois qu'elle ne les ait pas étouffés.

Leurs habits ne portent pas de marque, ou celles des grandes enseignes discount de banlieue, ils sont un peu justes, étroits, légèrement élimés parfois mais jamais troués comme les jean's à 200 euros des crétins friqués. Neuf fois sur dix, ils sont silencieux, ne geignent pas, ne réclament pas, ne déblatèrent pas des inepties bruyantes sous les yeux enamourés et admiratifs de parents qui les vénèrent, encore abasourdis d'avoir mis au monde de telles merveilles, presque aussi laides, vulgaires et bêtes qu'eux-mêmes...

Ils sont un peu en retrait comme s'ils ressentaient inconsciemment leur appartenance à un autre monde, comme s'ils avaient déjà intériorisé leur place de relégués, d'héritiers du désintérêt général.

Ils n'ont pas de téléphones portables et regardent défiler les stations. Parfois, ils interrogent leur mère sur le nom d'une d'entre elles. Souvent elle ne sait pas et se contente de leur sourire en leur disant qu'il faudra demander à papa, qui ne saura pas davantage, ou à la maîtresse. Ils repartent alors dans leur observation muette.

Ils n'ont ni l'air malheureux ni heureux, mais, paisibles et discrets, ils semblent déjà s'effacer, comme les derniers vestiges d'une France subclaquante, cette France d'avant où il ne fallait pas encore choisir entre winners en marche et racaillles importées.

Quand ils quittent le wagon, nous laissant avec les autres – petits cadres à écouteurs high-tech, mamas pialliantes en boubous , clodos puants, connasses peinturlurées comme des voitures volées ou lecteurs trentenaires de mangas - on se sent alors juste un peu plus triste, un peu plus seul. Encore un peu plus.