Le populisme, opium des peuples...
De Breixit en Trump, on a « le droit » (sacro-saint bien sûr!) de se réjouir de ces psychodrames médiatico-journalistiques et de se délecter des mines déconfites des petits soldats de la bien-pensance, tellement persuadés de faire partie du camp du Bien universel que chacune de leur contrariété est élevée au rang de tragédie mondiale… Bien sûr, on peut ricaner un peu, ouvrir une bouteille de champagne s’il nous reste un peu d’oseille, se passer en boucle les visages déformés d’horreur des militants démocrates à l’heure de l’annonce de l’élection du grand méchant Trump et faire des petits sauts facétieux et satisfaits sur son divan face au téléviseur… Ca soulage et ça ne mange pas de pain… A condition toutefois de bien garder à l’esprit que ces soubresauts du système lui sont parfaitement intégrés, qu’ils ne surprennent et ne dérangent que la piétaille abrutie du politiquement correct et nullement les véritables tenants de l’oligarchie (voir la réaction des Bourses mondiales à l’élection du milliardaire libéral Trump…) et qu’il ne s’agit au final que d’un nouvel épisode mélodramatique orchestré par la Société du spectacle, si bien décrite mais jamais totalement démasquée. Concrètement, pratiquement, effectivement, ordinairement, rien, absolument rien ne change (conséquences du Breixit sur le prolo de Liverpool ?), mais on maintient l’illusion que tout peut encore changer, basculer au gré d’une échéance électorale; on nourrit la boite à fantasmes « réformateurs », et, plus exactement, on continue à laisser penser que le changement et même « la révolution » peuvent venir du vote, des élections. Dans ces turbulences bouffonnes, la fiction démocratique reste préservée, elle en sort même grandie. « Vous voyez, le peuple peut encore faire barrage au système ! Sa voix peut encore être entendue et même s’imposer ! ». Au prix, fort raisonnable, de quelques grimaces de chroniqueurs de Libération et de chapelets de larmes d'étudiantes de Sciences Po, on proroge donc l’illusion démocratique, on maintient la contestation dans l’idée que « seule la voie électorale est porteuse d’avenir et de potentialité efficiente » et on continue joyeusement à sa goberger et à se partager les bénéfices.
Tous ces épisodes volontairement dramatisés, montés hystériquement en sauce, n’ont pas d’autres fonction que d’assurer la survie artificielle du cadavre de plus en plus décomposé et puant de la démocratie représentative. Le bulletin de vote, il n’y a que cela, rien d’autre ! Regardez à quel point vous avez réussi à nous faire peur avec votre bulletin de vote ! Oulala, on en frémit encore dans les conseils d’administration et les couloirs de Wall Street ! Ne cherchez pas d’autres voies, ne travaillez pas dans d’autres directions, n’envisagez pas de vraies ruptures ni de concrètes sécessions, continuez à voter pour le prochain épouvantail populiste qu’on vous agitera sous le nez, de Beppe Grillo en Italie à Geert Wilders, en Hollande… Vraiment ça nous terrorise, on se chie dessus, croyez-nous !