Les ricanants
L'humour, cet allègement des jours, n'a rien - ou du moins si peu - à voir avec le ricanement aigre et méprisant qui constitue désormais le fond sonore de notre temps. Cet arrosage permanent de postillons rigolards expulsés par des bouches torves, des lèvres en cul de poule bouffies d'autosatisfaction plantées au beau milieu de grosses têtes de premiers de la classe vissées sur des corps étiques et débiles secoués de spasmes d'hilarité onaniste. Insupportable ironie morbide des "chroniqueurs", "commentateurs" et journaleux télévisuels divers, tendance Canal+ ou autre sous-produit TNTesque. Ces histrions, mi clowns, mi Saint-Just, confits dans la bien pensance et la soumission grassement stipendiée aux dogmes, se prennent néanmoins pour la quintessence de la transgression et de l'irrévérence. Larvesques jusqu'au seuil de la sédimentation, ils se congratulent mutuellement de leur fielleuses saillies sur cibles autorisées et se cooptent d'un plateau à l'autre, d'un hochement de tête et d'une tape dans le dos. Toujours en se gaussant, en se poilant, car ils sont sympas, funs et cools. Ce sont les joyeux petits marquis du bas-empire putrescent.
Une cachinnation de Yann Barthès ressemble à une vomissure de blatte.
Cette époque a même réussi à rendre le rire sordide.