Les stratèges
Depuis 20 ans, les doctes et les habiles vous parlent de « stratégie »... S'ils vous en parlent, bien sûr, c'est que, vous, de « stratégie », vous n'en avez pas... Vous, vous êtes un con, un gentil con, certes, mais un con quand même... Ou, au mieux, un « romantique », sorte de doux dingue un peu évanescent, la tête dans les livres, le regard dans les étoiles et les mains dans les poches... Quelque chose entre le clown triste et le bouffon agressif... Un inutile bruyant et vindicatif. Evidemment, quand cela fait près de 25 ans que vous vous cassez le cul pour ce que vous pensez être « la cause », ça vous fait justement un peu mal au fondement, mais vous vous y êtes habitué malgré tout. C'est comme ça. Il y a d'un côté les pragmatiques, les diplomates, les subtils, les « stratèges » donc, et de l'autre les histrions vaguement névrosés qui masquent leur refus du réel derrière une radicalité qui n'est, bien entendu que de façade. Les stratèges, eux, ils bossent. A quoi ? C'est souvent un mystère mais c'est justement pour ça que c'est « stratégique »... Les réalisations ne sont pas visibles ni concrètes, mais se composent peu à peu dans les couloirs et derrières les portes capitonnés des bureaux climatisés... Les « stratégies » révèlent toujours leur efficience et leur efficacité « sur le long terme ». Le très long terme même bien souvent... Une « stratégie » est d'ailleurs d'autant plus remarquable que le commun des mortels ne peut discerner aucun de ses effets. C'est d'ailleurs là, l'un des secrets des « stratégies ». On ne peut pas trop en parler, mais on verra ce qu'on verra. Le jour où...
En réalité, la stratégie devient bien souvent sa propre finalité, et ceux qui prétendent « mettre les mains dans le cambouis » les mettent bien plutôt dans le pot de confiture. La soupe est bonne et les pantoufles confortables. Même les meilleures bonnes volontés s'y échouent.