Bonne gouvernance
« La fin du voyage est proclamée. Pas celle du tourisme de masse, qui consiste de plus en plus à n’aller nulle part qui soit vraiment ailleurs, mais à tourner en rond dans l’univers du contentement de soi et du même formaté, conformé et mondialisé – à vérifier que le monde est bien un catalogue de voyage, à comparer l’original aux photos : celle du voyage comme déplacement, éloignement, exposition à l’autre, mesure que l’autre se dérobe, se défend. Dans le monde annoncé, plat, sûr, accessible, il y aura encore à voir, il n’y aura plus rien à vivre. La conformité, le développement, la bonne gouvernance seront passés par là. Et l’autre, le monde du différent, de l’écart, du divers se dérobe. L’entrée du jardin de l’autre est interdite. Ce n’est pas qu’il disparaît, c’est qu’il n’est plus à voir, qu’il ne se rencontre plus, qu’il s’éloigne. »
Hervé Juvin, « La grande séparation », Gallimard – Le débat