Noël, connais pas.
Tous les flics, les pompiers, les assistantes sociales, les infirmières et les bistrotiers le savent : Noël est une sale période pour les gens seuls. Comme si la lumière crue des décorations et des vitrines soulignait avec plus de violence et d'impudeur qu'à l'ordinaire la misère de ceux qui n'existent pour personne d'autre qu'eux-mêmes. Non pas qu'elles soient toujours à plaindre, ces ombres du temps, ces silhouettes sans consistance, sans avenir, certaines ayant échoué dans le cloaque de l'indifférence et de l'isolement par excès d'égoïsme, de vanité ou de veulerie. Mais d'autres y croupissent par hasard, malchance, erreur d'aiguillage, accident ou trahison... Tragédies romanesques ou naufrages ordinaires, ils ont essayé et n'ont pas réussi. Et Noël leur crache à la gueule ses flons-flons, ses discours publicitaires, ses débauches mercantiles, sa ferveur familiale factice mais effrénée ... Tout ça pour soi disant célébrer un Christ sensé être venu pour eux. Mais il n'y a plus que des parvenus et des privilégiés qui se pressent aux messes de minuit devenues de simples conventions sociales à l'horaire aménagé pour ne pas interférer avec la grande ripaille.